"thunder only happens when it's raining"
((atmosphère sonore))
amère ; audacieuse ; bornée ; débrouillarde ; déterminée ; directe ; en reconstruction ; fière ; impulsive ; libre ; parfois maladroite (dans les mots) ; maligne ; méfiante ; passionnée ; perspicace ; rancunière ; sarcastique ; vulnérableI. family portrait.
Les Welch vont à l’église le dimanche matin et tirent sur des boites de conserve le dimanche après-midi. Aux alentours de 17 heures, Maman est affalée dans son vieux transat de camping instable, les jambes écartées pour en rétablir l’équilibre en un minimum d’efforts. Les lunettes de soleil vissées sur son nez dissimulent ses yeux absents tandis que plusieurs cadavres de son
cocktail spécial et un vieux magasine gisent entre ses pieds. Papa essaie d’être là le dimanche : c’est un jour à passer en famille. Mais souvent papa n’est pas là, même le dimanche – et quand il est là il ne l’est jamais vraiment. Sa vie c’est la route, son chien et son camion ; pour le reste, personne n’a intérêt à le solliciter. Puis il y a Tig. Tig trouve utile d’apprendre à tirer – d’ailleurs, à Clifton, c’est presque indispensable – et Beth trouve qu’il a raison. Ca tombe bien : les armes à feu, ce n’est pas ce qui manque à la maison. Alors le dimanche après-midi, les Welch – Tig et Beth – tirent sur des boites de conserve sous la surveillance toute relative de Mary. Car Mary ne se souviendra ni de cet après-midi ni de beaucoup d’autres. On trouve son compte là où on peut : l’aîné comme la cadette profitent de tous ces manquements pour alimenter en continu le perpétuel bordel de leur existence. Papa et maman se retrouvent dans leurs absences – il n’y a rien à en attendre de mieux. Quand il est là, Papa Joe va en ville, au bar, et on n’est pas près de le revoir avant le lendemain après-midi si on a de la chance. Quand maman est « là » faut éviter de faire du bruit : elle est en gueule de bois de l’espace et troque vite sa lucidité contre quelques anti-douleurs
un peu forts. Et quand ils sont là ensemble mieux vaut ne pas l’être : Joe et Mary sont la Huitième Plaie. Alors Tig et Beth ne sont plus là. Tig et Beth partent ensemble dans les rues de Clifton et retrouvent ceux qui leur ressemblent. Deux produits estampillés
white trash, persuadés d’être moins abrutis que leurs abrutis de parents et dévorés par leur furieuse envie de vivre. Ils étaient ensemble au début, ils le seront jusqu’à la fin.
II. girl from the south.
La lumière jouait parfois si bien avec ses cheveux qu’on aurait cru voir un ange. Sa blondeur et ses yeux bleus confirmaient l’illusion aux idiots seulement : tout le monde savait qu’hormis la forme, Elisabeth Welch n’avait rien en commun avec un doux chérubin. Elle avait le rire enchanteur et les yeux pétillants, et ça s’arrêtait là. Trop fière pour ce qu’elle était, trop confiante, sa charmante petite tête était remplie de rêves bien trop grands pour une fille qui, comme la grande majorité des habitants de Clifton, ne quitterait
jamais la ville. Un jour elle serait mannequin et parcourrait le monde et ses podiums ; à moins que ce ne soit actrice, à parcourir le monde et ses plateaux. Elle était belle Beth, puis elle jouait assez bien la comédie. Mais y a jamais personne qu’est venu la chercher à Clifton pour en faire une star et elle, elle a jamais été tenter sa chance ailleurs – comme si c’était indigne d’elle. Si les Welch étaient naturellement loin d’être aimés de tous, les enfants jouissaient d’une popularité étonnante auprès des gamins de leur âge. Beth était libre de faire ce qu’elle voulait quand elle le voulait sans aucun autre contrôle que celui de son frère. Elle était belle et fière, elle osait tout, tout le temps. Ses premières fois ont été faites avant tout le monde et aucun défi n’aurait su lui résister. On aimait Beth parce qu’elle était capable d’aller voler le cheval préféré du vieux Butler, parce qu’elle ramenait de l’alcool en soirée et qu’elle se laissait pas facilement tripoter. On aimait Beth parce qu’elle était flamboyante, intrépide et brutalement vivante.
Mais sûrement pas pour sa grande gueule.III. nature boy.
Il était au moins aussi beau et flamboyant qu’elle – et plus intrépide encore. Y avait déjà pas souvent de nouveaux arrivants à Clifton : les Saracen étaient devenus la curiosité du moment. Si la méfiance avait d’abord régné entre les habitants de la ville et les nouveaux venus, ces derniers avaient réussi à s’intégrer assez facilement finalement. C’avait été saisissant ; au point de la pousser dans ses retranchements. Elle ne s’était jamais sentie aussi à nu avec quiconque et n’avait rien su faire d’autre que rester sur la défensive. Sa fierté ne pouvait pas accepter de s’être laissée submerger : entre Beth et Mason, c’est comme ça que ça a commencé. Il était arrivé au début des vacances d’été. Comme beaucoup à Clifton, Tig et elle étaient restés puisqu’ils n’avaient nulle part où aller. Leurs premiers rapports ont été explosifs –
tout était explosif entre eux. L’alchimie des cœurs, des corps, tout était là pour la catastrophe. Leur amour était unique, sincère, puissant. Ils s’aimaient trop. Ce n’est jamais bien d’aimer trop. Beth et Mason n’étaient pas raisonnables ensemble ; à l’époque ils ne savaient même pas ce qu’était la raison. Quelques semaines après s’être rencontrés, l’un et l’autre se promettaient de ne jamais se quitter. Ils étaient heureux. Heureux de s’être trouvés et de s’aimer comme de rêver ensemble d’un avenir certain conjugué à deux. Puis un jour il y a eu les premiers gestes qui ont dépassé la pensée.
C’était rien. Beth n’était pas une fille qui se laissait faire. Ca l’avait étonnée, bon : la surprise ne la prendrait plus. La fois d’après, la surprise l’a prise quand même :
c’était rien non plus. Tellement anecdotique qu’on pouvait dire que ça n’arrivait jamais, et jamais c’est un peu comme rien finalement.
Ils s’aimaient et c’était beau.IV. mother.
Elle a du retard. La contraception n’est pas un sujet beaucoup évoqué autour d’elle et Beth ne suit pas vraiment l’affaire de près. Mais quand même,
elle a du retard. Assez pour le remarquer et pour s’en inquiéter. Seize ans c’est un peu tôt pour avoir un enfant. Peu importe : en fait, la question de l’avortement ne se pose même pas. A Clifton, au Texas ? Ca existe mais
ça ne se fait pas. Tous les dimanches ils se retrouvent à l’église et s’observent entre eux :
ça ne se fait pas. Les nausées s’installent et Beth est obligée de se confier. C’est à Tig qu’elle en parle en premier ; à Tig qu’elle montre à quel point l’idée peut la terrifier. C’est Tig qui se débrouille pour obtenir un test de grossesse, puis un autre parce que le premier a pas fonctionné. C’est Tig, encore, qui reste à côté d’elle quand elle dégueule et fond en larmes ; Tig qui appelle Mason pour qu’il les rejoigne et qu’ils règlent cette histoire ensemble.
Mère à seize ans mais à seize ans, elle s’est jamais demandé, vraiment, si elle voudrait être un jour maman : elle sait même pas à quoi ça ressemble. Tant pis, allez ; c’est fait maintenant. Dans quelques mois tiendra dans ses bras le petit corps de
son bambin. Pour les Welch comme pour les Saracen les gamins doivent se marier. Beth et Mason s’unissent donc quelques mois avant l’arrivée de l’enfant et entament leur vie de couple chez les parents de l’heureux élu. Tout va trop vite. Et puis, un soir de novembre, Clyde a débarqué dans sa vie.
V. dancing queen.
Ils avaient tenu à aller au bal de fin d’année. Beth avait fait ses meilleurs efforts pour retrouver sa ligne de jeune fille et rassembler assez d’argent pour la robe de ses rêves : elle était reine d’office, avant même l’annonce des résultats des élections. De fait, Mason et elle brillaient de mille feux dans la salle de bal du lycée tandis que le petit Clyde se faisait garder par son oncle préféré. Sarah s’était donné un mal de chien pour organiser une soirée mémorable ; tout était réuni pour passer un excellent moment. Kyle avait ramené quelques cachets et têtes de weed et Mason de quoi charger leurs verres. Plus tard, ils avaient tous réservé dans un hôtel – Ash et Cat auraient même un jacuzzi au milieu de leur chambre – pour continuer la soirée ensemble. Ally gérait les platines avant que Ben et son groupe ne prennent les commandes de la soirée pour une petite heure. Ils n’avaient ce soir qu’à profiter de la piste, des photographes, des ateliers, du buffet et d’eux ; tout du moins jusqu’à l’annonce des résultats des élections. Et finalement, si Mason a bien été élu roi de la soirée, c’est Hellen qui est montée sur l’estrade à ses côtés.
VI. my baby shot me down.
On ne voit pas ces choses-là ; même quand elles se produisent sous notre nez. On se dit que c’est un peu étonnant un col roulé ou des manches longues par ce temps ensoleillé – mais pourquoi pas après tout : Beth, elle dit que c’est la mode et à Clifton, la mode, presque tout le monde s’en fout. Les marques qu’on entraperçoit sans s’en rendre compte ne sont que les résultantes d’une chute malheureuse ou d’un bête accident – c’est d’ailleurs fou comme Beth est devenue maladroite avec le temps. On dit qu’elle se maquille de plus en plus aussi ; les années n’ont fait qu’accentuer sa coquetterie. Sa santé s’est fragilisée : parfois c’est pendant des jours qu’on ne la voit pas –
des migraines qu’on leur dit.
Vous inquiétez pas. Les voisins racontent qu’avec Mason de temps en temps ils se disputent
un peu fort, d’accord, mais dans leur situation ça fait sens : ils se sont enchainés trop vite et trop tôt. Et tout est plutôt normal finalement : on ne s’étonne plus de rien. On sait qu’ils ont des problèmes d’argent, que Mason joue, que Beth dépense ; puis on les a déjà croisés
avec d’autres dans des circonstances qui n’ont jamais eu besoin d’être grand-chose pour que l’imagination – souvent collective – fasse le travail. Mais de toute façon, à Clifton, on fait toujours des histoires pour rien et on fait rien des vraies histoires. Puis finalement, quand la vérité éclate au grand jour, tout le monde se demande
comment il a été possible de passer à côté.
Il y avait toujours
une bonne raison pour
expliquer pourquoi. Des
circonstances qui rendaient la chose
compréhensible même si, toujours,
la chose faisait mal.
Il n’y aura jamais de bonne raison pour expliquer pourquoi. Ca pouvait partir de n’importe quoi : leur histoire ne s’accrochait plus à rien. Le plus souvent, Mason ou Beth rentrait « du travail » un peu tard et il ne fallait rien de plus pour que la machine se lance. Il y avait toujours un reproche à faire comme un autre à renvoyer. La dispute partait et rien ne pouvait plus l’arrêter jusqu’à ce que les cris et les poings se substituent aux mots. Alors si Beth mettait un col roulé ou des manches longues par ce temps ensoleillé, c’est parce que Mason l’avait étranglée ou agrippée
un peu fort. Si on a remarqué plus de maquillage ou quelques marques sur son corps, c’est parce que Mason l’avait giflée ou frappée
un peu fort. Puis il y avait ces fois où il frappait
trop fort ; et il y a eu cette fois où il est allé
trop loin.
VII. beautiful boy.
Là, sur son lit d’hôpital, à travers la douleur et les anesthésiants, elle perçoit la chaleur du corps de Clyde blotti contre elle. Elle sait d’instinct que c’est le sien : avant même d’en deviner la taille, d’en sentir l’odeur ou d’en apercevoir les contours. C’est la façon dont il respire, la régularité de son souffle endormi échouant sur sa blouse ; c’est la façon dont ses bras reposent sur elle, dont ses doigts s’accrochent aux revers et aux plis de sa manche. Clyde a dû grandir trop vite : on le voit jusqu’aux sourcils froncés dans son sommeil profond. Elle n’a jamais su ni même eu l’occasion d’être la mère qu’elle aurait voulue pour lui et est trop bien placée pour connaitre le calvaire vécu au quotidien avec eux. Mais là, tout contre elle comme ça, Beth se sent
maman ; plus maman qu’elle ne l’a jamais été : l’envie urgente de jouer avec ses mèches rebelles entre ses doigts gonfle chaque cellule de son corps. Mais elle ne peut pas bouger ; elle a mal. Une certitude à peine consciente, assez étrange, qu’elle ne mesure que selon le niveau d’engourdissement des différentes parties de son corps. La mémoire revient en même temps que le brouillard se désépaissit et l’étrange bulle de sérénité dans laquelle elle s’était blottie éclate. Le retour des sens agit comme une bombe à retardement pour exploser dans la quasi-totalité de son crâne, son ventre, ses côtes,
partout. La douleur arrache un gémissement qui ne sort pas : seul un filet d’air sifflant franchit l’interstice de ses lèvres tuméfiées. Le goût du fer lui remplit encore la bouche ; elle n’est pas restée inconsciente
si longtemps. Quand même, son pronostic vital avait été engagé et il s’en était fallu de peu pour que Clyde perde sa mère. Aurait-ce été si grave ?
Clyde a dû grandir trop vite : on le voit jusqu’aux sourcils froncés dans son sommeil profond. Cette fois-ci, Mason aurait pu la tuer. Ca fait combien de temps maintenant qu’elle a peur de lui ? Combien de temps qu’elle persiste dans le déni ? Combien de fois qu'elle a rêvé, parfois plus sérieusement que d’autres, de rassembler quelques affaires pour partir loin d’ici ?
Mais après elle, ce serait qui ? Et maintenant, ce sera quoi ? Là, sur son lit d’hôpital, à travers la douleur et les anesthésiants, la honte n’en finit plus de s’appesantir sur elle. La honte d’être ici, dans cette situation, en tant qu’elle,
elle, Elisabeth Welch Saracen ; d’avoir laissé les choses dégénérer au point de finir là, maintenant. La reine de son monde est devenue une
victime ; une qui excuse, amoindrit, défend quand elle ne pense plus à le faire pour elle une fois face à lui – pas quand il est
comme ça, non. Quelle mère. Quel exemple. Elle aurait dû mieux faire – au moins mieux que ses parents : la barre n’était pas haute. Et pourtant Beth,
tu peines déjà à l’atteindre. Mais Clyde est blotti contre elle ; elle l’a reconnu viscéralement, instinctivement, avant même de n’avoir conscience de quoi que ce soit d’autre. Clyde est blotti contre elle, le souffle endormi de sa respiration échouant sur sa blouse, les bras posés sur elle tandis que ses doigts tiennent les revers ou les plis de sa manche. Et Beth a cette furieuse envie de jouer avec les mèches rebelles de ses cheveux.
Elle pleure. Peut-être parce qu’elle a mal ; ou qu’elle ne peut pas ; ou tout à la fois.
VIII. walking disaster.
Et tout est devenu plus dur.
Beth n’a plus jamais revu Mason après cette nuit : une formidable délivrance mais une terrible perte aussi. Le mal s’était infiltré dans chaque recoin du corps, du cœur, de l’esprit :
tout est devenu plus dur. Reconnaitre et accepter ce qu’ils s’étaient infligé toutes ces années relevait de l’impossible. Et finalement, pour toute la fierté mal placée qu’elle nourrissait comme pour la honte incommensurable d’être ce qu’elle était, Beth est devenue son propre bourreau. On peut échapper aux autres ; pas à soi. Alors elle a cherché des alternatives, s’est (trop) souvent perdue dans tout ce qui lui donnait la sensation de ne plus
être elle. A son tour d’avoir son
cocktail spécial. A son tour de ne jamais
être là, ni pour elle ni pour personne. Le cerveau dans la brume, elle était moins que l’ombre de l’ombre d’elle-même : elle était la honte. Des mois, des années se sont évanouis, perdus dans les méandres de souvenirs approximatifs dont elle ne parvenait à extraire qu’une substance aussi ténue qu’informe. Le trou s’est creusé et les parois en ont été soigneusement poncées, lissées pour ne laisser aucune aspérité à laquelle s’accrocher : une fois bien profond et terminé et bien au fond de ce dernier, ni Beth ni personne ne saurait remonter.
IX. bloody eagles.
C’est Tig qui lui annonce. Tig est déjà
l’un d’entre eux ; depuis des années, en fait, et la question a posé plus d’une fois problème. Ce qui touche Tig touche Beth et ce qui touche Beth touche Tig – d’une manière ou d’une autre. Et peu importe finalement : l’affaire dont il est question les touche directement. Clyde a décidé de rejoindre les Bloody Eagles.
― Formidable. La fumée s’évade de ses poumons dans un soupir tandis qu’elle ouvre la fenêtre de la cuisine pour faire circuler l’air. Le vrombissement d’une moto se fait entendre au même moment, un peu plus loin au croisement de Wellington Road et Relling Street.
― Toi et tes copains vous faites vraiment vraiment vraaaiment chier. Des yeux accusateurs se posent sur Tig. Les bras de l’inquisitrice se croisent.
― Commence pas Beth. Elle ricane.
― Commence pas quoi ? ― Tu sais très bien. Oui, elle sait très bien. Elle sait très bien qu’il peut l’acculer de tous les reproches possibles et qu’elle n’aura rien d’autre à répliquer que quelques excuses aussi évidentes qu’inutiles : tout était déjà fait, non ? La cigarette rejoint ses lèvres tandis que ses bras se croisent. Ses sourcils se froncent – comme toujours – alors qu’elle tire sur la tige entre ses doigts.
― Tu sais qui gagne le concours de la meilleure mère et du meilleur oncle ? Un sourire aussi désabusé que complice nait finalement pour Tig. Il ne connait évidemment pas la réponse.
― Pas nous, qu'elle souffle dans un nouveau nuage de fumée. Cela dit, ce n’était pas vraiment une question : il le savait bien. Le sourire du frère répond au sien.
― Non, pas nous. Tig n’a pas besoin de préciser
quand même qu’il est plus proche du meilleur oncle qu’elle ne le sera jamais de la meilleure mère : ils le savent tous les deux.
― Fais attention ok. L’aîné soupire tant ces trois mots sont inutiles.
― J’te tue sinon. Beth ne sait pas formuler ce qu’elle pense mais avec Tig, il n’y a pas besoin de parler pour comprendre.
Elle voudrait juste qu’il fasse mieux qu’eux.X. breathe.
Elle a décidé qu’elle ferait mieux ; mieux que tout ce qu’elle a fait jusque-là comme tout ce qu’elle a pu deviner devant elle.
Elle a décidé d’exercer un peu plus d’emprise sur sa vie à défaut de parvenir à la maitriser – personne ne maitrise tout à fait quoi que ce soit ici bas. De s’écouter plus et
de s’écouter moins, rallumer le volume de cette voix intérieure plus raisonnée, moins fière ou scandalisée par ce qu’elle était/est ; de porter sur elle un regard à la fois fidèle et sévère mais aussi bienveillant. Et puis de fil en aiguille, de semaines en semaines, de mois en mois, Beth a accroché le mieux. Elle ne boit plus ou essaie de – les vieux démons ont la peau dure et se gardent toujours de beaux jours devant eux. C'est surtout qu'elle ne cherche plus à se perdre. Et puisqu’il n’est pas question de retrouver ce qui n’existe plus, Elisabeth Saracen a décidé de reconstruire.
La route sera longue.