Surnom : Dallas dans la bouche de tout le monde, puisqu'il est facile de massacrer son nom de famille. Certains s'amusent à tenter de le héler par d'autres villes texanes, pour la vanne.
Age : Le gamin se pense déjà homme, se rase excessivement dans l'espoir de fournir une barbe parsemée. Dix-neuf ans, le lycée à peine derrière lui et l'interdiction de se payer une bière - mais pas un flingue. God bless America, I guess ? - 19.05.2005
Adresse : Squatteur depuis que la tempête a tout emporté à Trailer Park. Il migre de canapé en canapé dans l'attente d'un appartement dans ses moyens. En manque de courage, puisqu'il lui suffirait de décrocher son portable et de demander de l'aide. Mais ça inquiéterait sa mère.
Labeur : Larbin, homme à tout faire, plongeur, passeur de serpillère et champion du ramassage de vomissures en tout genre au Bloody Counter. Le prospect attend impatiemment les écussons qui viendront habiller son cuir, pour l'heure toujours vierge.
Coeur : Les jeux de l'amour ne l'intéressent pas. Les filles l'accompagnent parfois pour quelques nuits, le temps d'une poignée de sourires, sans jamais s'attarder. Célibataire et il les respecte trop, ces femmes, pour les laisser gâcher leur temps en sa compagnie.
Berceau : Les périphériques constamment pleins et les gratte-ciels occultants de la capitale de l'Etat. L'air irrespirable et pollué d'Austin, Texas ne vaudra jamais les étendues désertiques et le ciel bleu de Clifton.
'Cause everyone's growing and everyone's healthy
I'm terrified that I might never have met me
Préférences rp : ✺ Troisième personne
✺ De 500 à 3000 mots, laissons-nous porter.
✺ Dialogueen français ou en anglais, venez comme vous êtes.
l'obscur
tw. mentions d'alcool et d'activités illégales.
Your boldness stands alone among the wreck - atmosphere -
Les anniversaires sont faits pour les gamins, disent les plus âgés. Peut-être que Dallas n’est pas aussi grand qu’il veut le faire croire, toujours enthousiaste à l’idée de fêter les victoires et un nouveau tour de planète - aussi minuscules qu’en soient les raisons. Une année complète, une révolution autour du soleil, non pas pour le gosse mais pour le cuir qui couvre ses épaules. Une année entière pour le patch de prospect cousu sur sa veste. Une année achevée sous les lumières tamisées et sombres du Bloody Counter. Il en pousse la porte comme on entre chez soi, avec confiance et habitude. Les effluves de sueur et de bière l’accueillent, au milieu d’un brouillard de tabac, et le brouhaha des conversations viriles emplit l’espace et ses pensées. L’euphorie dans le coeur, un sourire goguenard sur le coin de la gueule, Behrendt est intouchable. De cette invincibilité propre aux jeunes esprits naïfs, pas encore abîmés par la vie. Sous peu, le gosse arrachera le rang de troufion de sa poitrine pour y apposer celui tant convoité de membre de la famille, de nouveau frère.
Combien de bottes ont foulé ce sol poussiéreux avant les siennes ? Des centaines et des milliers, des semelles les plus hésitantes aux martèlements les plus respectés. Toutes les histoires dont Dallas se gave depuis un an ont commencé ici, sur le seuil de cette porte. Tous les hommes qu’il admire tant se sont un jour retrouvés à sa place, le dos de la veste vierge et la rage de vaincre au creux du ventre. Et cette seule pensée le galvanise, le gosse, de se savoir marcher dans les pas d’Austin. Dans ceux de Clyde. Dans ceux de Marcus.
Ici est sa place, certitude écrasante qui ne laisse pas lieu au doute. Chemin de vie tumultueux, semé d’embûches, mais quelle vie existait-il pour lui en dehors de Clifton et des Bloody Eagles ? Une existence morne dans la normalité la plus ennuyeuse, parcours de vie moyen pour une destinée moyenne. Diplôme dans la finance, marcher dans les pas d’un père qui n’est pas le sien et se réveiller à quarante-cinq ans avec l’envie de se tirer une balle. Carrière sportive lucrative où il aurait été incapable de différencier les vrais amis des intéressés. Dans l’étau d’un choix entre médiocrité et solitude, Dallas a choisi la troisième option en revêtant le cuir - succès et famille. Qui pourrait bien l’en blâmer ?
L’aversion de Tig pour Behrendt n’est pas un secret. L’hostilité dans le fond de ses prunelles colore ses yeux d’une teinte amère, proche de l’expression favorite d’Henri - quand le sale gosse vivait encore sous le toit familial. L’atrophie de ses muscles faciaux et sa carrure imposante rendent cependant le sergent d’armes plus impressionnant que le pauvre banquier, dans ses costumes trop larges pour ses maigres épaules. Gueule de tueur, attitude de chef de meute, et l’avorton de la portée n’est pas certain de savoir sur quelle patte danser en sa présence. La familiarité n’a pas sa place dans les plus hauts rangs de la hiérarchie et Welch paraît immunisé à la flatterie.
Dallas roule des épaules et ajuste sa veste. Son pas se fait plus léger, sa démarche appuie sur le bout de ses pieds pour se grandir fictivement d’un bon centimètre. Il n’est pas petit, le prospect, mais son visage de poupon n’est pas d’une grande aide dans sa course au respect. Ce n’est pas de sa faute qu’il arguerait volontiers. Pas de sa faute si l’occasion de faire ses preuves ne s’est pas encore présentée, qu’il est toujours relégué aux tâches les plus ingrates et les moins valorisantes. Pas de sa faute non plus si le vioc refuse de lui laisser le bénéfice du doute, hermétique aux approches tentées par son cadet au fil des mois. Cette quête de reconnaissance permanente est une malédiction que Dallas traîne entre les tables du Bloody Counter, mais aussi depuis ses premiers balbutiements enfantins. Pas facile d’évoluer sans modèle, pas facile de choisir la bonne voie en ignorant ce que l’on veut. En ignorant ce que l’on vaut.
Le blondinet rejoint le comptoir, les mains moites et la poitrine alourdie d’appréhension. Il est un homme, sur sa moto. Il est un homme, dans les draps des filles qui accompagnent parfois ses nuits. Il est un homme, quand il porte cette veste. Mais il n’est qu’un gosse quand vient l’heure de réclamer sa tape dans le dos et son bien joué fiston, que ni Tig, ni Austin ne sont prêts à lui offrir - à son plus grand regret. « Une bière, s’te plaît. » qu’il demande au Bloody derrière le comptoir et ici, inutile de faire jouer cette fausse carte d’identité avec laquelle il se balade d’habitude. Ses doigts pianotent sur le bois humide, déjà noyé sous les verres renversés par les plus maladroites - ou les plus ivres. Son main tombe finalement à plat, appui qui lui donne l’impulsion de se remettre plus droit. Plus grand. Plus adulte, quand il ose se tourner vers le gardien des enfers. Clyde n’est même pas en ville pour lui servir de bouclier. « Tig. » Un léger hochement de tête en guise de salut et le sergent d’armes n’a pas droit au monsieur que Dallas balance à tout va au vice-président. « On peut parler ? Genre, deux minutes. » qu’il tente avant de récupérer sa bière pour s’approcher. « J’voulais en parler à Marcus, mais t’es l’mieux placé, j’pense. » Explication mêlée de flatterie, le gamin excelle dans l’art d’être un lèche-bottes. « Parce que ça fait quand même un an qu’j’suis là, aujourd’hui. »
Jean Lowe, Tig Welch, Livia Pereira, Bliss Llewelyn, Elisabeth Saracen et Jared Cassidy aiment ce message
Jeu 22 Aoû 2024 - 14:00
Tig Welch
p e a c eo fm i n d
le clair
Age : Le regard terni par quarante-six années de vie, il accuse l’usure du temps et des cycles répétitifs, les mains aussi râpées que les mots qu’il utilise avec parcimonie.
Adresse : Nid construit à Midtown.
Labeur : La direction toute trouvée, les Bloody Eagles lui ont tout apporté au moment où il en a eu la nécessité, une famille, un sens, une mission et il s’acquitte de ses devoirs sans rechigner. Devenu depuis sergent d’armes.
Coeur : Il s’est convaincu du bienfondé de sa solitude.
Berceau : Clifton, le point de départ et la ligne d’arrivée d’une course qu’il ne pense pas remporter.
« If your world falls apart, I'd start a riot. If night falls in your heart, I'd light the fire. In the dark, when you sound the alarm. We'll find each other's arms. »
« It's funny 'cause if we just sat and talked. You'd see that it's just hard for me to be vulnerable 'cause I blocked it off, I got trust issues growing up. »
« And we will step outside checking that the coast is clear on both sides. 'Cause we don't wanna be seen. This is suicide. But you can't see the ropes. »
« When everyone you thought you knew deserts your fight, I'll go with you. You're facing down a dark hall. I'll grab my light and go with you. »
Pseudo : sfs.
Pronom : Elle
Fc : Tom Hardy
Multicompte : Naila Ammari
Préférences rp : - Usage du français uniquement en RP (inconfortable avec les dialogues en anglais)
- De 600 à 1300 mots, je m'adapte sans problème à la personne que j'ai en face de moi
l'obscur
tw. mentions d'alcool et d'activités illégales.
Your boldness stands alone among the wreck - atmosphere -
Risible que sa quête de stabilité ait débuté dans un bar. Plus risible encore qu’il chemine désormais aussi souvent dans cet environnement. L’endroit incarne à la perfection sa dualité, décor familier abritant le réconfort déniché toutes ces années et lieu de débauche qui symbolise tout autant les travers qu’il ne peut supporter. L’ambivalence génère des comportements inconstants chez lui bien qu'il soit toujours présent quand la nécessité l’exige. Attablé pour discuter d’un sujet important et déjà prêt à passer le seuil dès que l’histoire sera réglée, Tig ne compte pas s’éterniser. Cet espace est dédié à la camaraderie et il accueillerait d’une façon horriblement erronée sa solitude. Il s’est prouvé pendant quarante-six années sa résistance au vice familial mais il a conscience que la génétique peut à tout moment le rattraper. Il suffit de voir l’empreinte que son éducation a laissé sur sa communication (désastreuse) pour comprendre les implications liées à l’affiliation. Il a beau lutter de toutes ses forces pour ne pas piétiner le même sol que ses parents, toutes les voies le ramènent au même point – retour à une toxicité ancrée. Il s’échine à foncer en direction de toutes les allées qui l’en éloigneraient, évolue à contrecourant dès qu’il le peut. Pour autant, il lui parait de plus en plus évident que cette particularité soit inscrite dans son code et qu’aucun bug ne pourra l’en déloger. Le reflet de cette vérité se matérialise sans difficulté dans le regard de la jeune recrue. Ses intentions plaquées or, faites de toc et de ferraille éraflée, il les a serties de nouvelles pierres pour lui. Des efforts vains car derrière chaque action, la noblesse ne s’est jamais réellement installée. Ce n’est pas la bonté ou la générosité qui le poussent à s’interposer. Aucune grande valeur ayant l’audace de valoriser un homme, ne viendra rassurer la démarche. Le seul moteur se nomme avec simplicité, il n’a pas besoin de fioritures pour s’annoncer (quand bien même, Tig se refuse à la tutoyer, à la désigner ou à la reconnaitre). Elle est au centre de sa survie, à la toute base de son mode de fonctionnement. La peur en unique amante, nourrissant des songes marqués par l’infortune, une liaison secrète qui refroidit les draps et raccourcit ses nuits. Partenaire de crime de l’insécurité, elle guide une partie de ses choix. Et s’applique, dans ce cas particulier, à barrer la route de Dallas.
Une réalité planquée soigneusement derrière une sévérité marquée, il n’a jamais réussi à endosser un autre rôle face à ce qu’il estime être sa responsabilité. La façade (peinte et repeinte à de multiples reprises pour ne pas concéder une vision directe sur ses différentes imperfections) abrite bien d’autres états d’âme. Le prospect présente dix-neuf années de doutes et d’égarement. C'est là qu'il avait lui-même quand il s'est engagé, convaincu comme ce gosse du bienfondé de sa décision. Il s’est trouvé tout un tas de raisons pour enfiler l’uniforme et prendre les armes. La plus simple et la plus stupide à la fois tient bien à son besoin de contrôle, perdu cette année-là dans les tracas de Beth. Un contrôle tout à fait, pourtant, relatif quand on ne représente qu’un pion de plus sur un champ de bataille. L’attirail lui a donné une fausse impression de puissance, de reprise de pouvoir. Ironique qu’il ait mis plusieurs années à le conscientiser. Tig aurait dû bénéficier d’un avis plus éclairé, aurait aimé avoir à ses côtés, une figure plus âgée pour le conseiller, l’alerter sur les conséquences de cet enrôlement. Si seulement, on avait pu le raisonner, il ne traverserait pas les jours comme un fantôme qui s’attarderait dans cette réalité, faute de comprendre ce qui l’a tué. Impossible de ne pas transférer les situations, de ne pas les dupliquer et les ajouter en surcouche à sa situation. Surtout quand Dallas le renvoie tout aussi sûrement à l’assurance que Clyde a démontré lui aussi. Il n’a pas pu prévenir les dangers pour l’un et s’entend vouloir les éviter à tout prix à l’autre. Au lieu de s’ériger en protecteur autoproclamé, il se donne des airs de cerbère qui garde la porte des enfers et qui lui en refuse l'accès. Peu importe au fond comment son acte est perçu (ça ne lui importe pas), lui ne doute pas de la nécessité à préserver ce gamin des flammes.
Il doit reconnaitre que le gosse a (pour son plus grand déplaisir) une volonté solide et assez de cran pour venir revendiquer cette place que le sergent d’armes refuse de lui céder. Cran qu’il lui redémontre en revenant se planter devant lui. Il l'intercepte avant que l'ancien militaire ait pu se diriger correctement vers la sortie. Cette persévérance, Tig la saluerait volontiers (autant de qualités avec sa combattivité qui lui vaut son respect bien que jamais manifesté) s’il ne l’utilisait pas pour foncer droit vers son péril. Le visage n’exprime que l’impassibilité tandis que son interlocuteur tente d’aborder le sujet épineux. « Et ? » La déduction est aisée à appréhender mais il prétend ne pas comprendre, espère presque le décourager en répondant avec aussi peu d’amabilité. « Mieux placé pour quoi ? Te refiler une médaille ou te préparer une fête surprise ? » Le sarcasme érode définitivement le ton candide de la conversation. Un an déjà qu’il est là (il aurait préféré qu’il ne le lui rappelle pas) et il ne s’est toujours pas dégonflé. L’amertume infecte le gosier, empoisonne ses prochains mots. « Qu’est-ce que tu veux exactement, Dallas ? Sois plus clair. » Il se permet tous les excès en parachevant son œuvre d’antipathie et en lui arrachant la bière des doigts. « T’es pas en âge de boire ça, je te signale. » L’idée que la consommation débridée de Marcus ne finisse par banaliser ce seul acte auprès de Dallas, lui glace le sang. Il ne souhaite pas à l'insouciant de terminer avec une dépendance et autant de séquelles (physiques et mentales) avant d'atteindre sa trentaine. Et s'il ne veille pas sur lui concrètement, qui le fera ?
Jean Lowe, Livia Pereira, Bliss Llewelyn, Dallas Behrendt et Jared Cassidy aiment ce message
Mer 4 Sep 2024 - 22:44
Dallas Behrendt
G O L D E NBOY
le clair
Surnom : Dallas dans la bouche de tout le monde, puisqu'il est facile de massacrer son nom de famille. Certains s'amusent à tenter de le héler par d'autres villes texanes, pour la vanne.
Age : Le gamin se pense déjà homme, se rase excessivement dans l'espoir de fournir une barbe parsemée. Dix-neuf ans, le lycée à peine derrière lui et l'interdiction de se payer une bière - mais pas un flingue. God bless America, I guess ? - 19.05.2005
Adresse : Squatteur depuis que la tempête a tout emporté à Trailer Park. Il migre de canapé en canapé dans l'attente d'un appartement dans ses moyens. En manque de courage, puisqu'il lui suffirait de décrocher son portable et de demander de l'aide. Mais ça inquiéterait sa mère.
Labeur : Larbin, homme à tout faire, plongeur, passeur de serpillère et champion du ramassage de vomissures en tout genre au Bloody Counter. Le prospect attend impatiemment les écussons qui viendront habiller son cuir, pour l'heure toujours vierge.
Coeur : Les jeux de l'amour ne l'intéressent pas. Les filles l'accompagnent parfois pour quelques nuits, le temps d'une poignée de sourires, sans jamais s'attarder. Célibataire et il les respecte trop, ces femmes, pour les laisser gâcher leur temps en sa compagnie.
Berceau : Les périphériques constamment pleins et les gratte-ciels occultants de la capitale de l'Etat. L'air irrespirable et pollué d'Austin, Texas ne vaudra jamais les étendues désertiques et le ciel bleu de Clifton.
'Cause everyone's growing and everyone's healthy
I'm terrified that I might never have met me
Préférences rp : ✺ Troisième personne
✺ De 500 à 3000 mots, laissons-nous porter.
✺ Dialogueen français ou en anglais, venez comme vous êtes.
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De sa mère, Dallas a hérité un nom imprononçable et une propension à l’auto-critique. Une certaine maniaquerie, dans le rangement de son espace de vie ou dans la façon de briquer une maison. Une légère fossette sur la joue, à peine creusée et presque invisible lorsqu’il tente de sauter deux jours de rasage. Le respect des femmes, aussi, et une galanterie parfois désuète. Si Rose Behrendt s’est acharnée à faire de son rejeton un bon gamin, le prospect a soufflé le château de cartes en un claquement de porte. Puisqu’elle n’explique pas, sa génitrice, les yeux bleus perçants et la blondeur de sa tignasse. Puisqu’elle est incapable de reconnaître son sang, dans la colère qui brille au fond des rétines de ce fils qui n’est le sien qu’à moitié. Puisqu’elle n’est pas mère de cette rage de vaincre qui grogne dans le fond de sa poitrine. Puisqu’elle n’a pu apporter que des bribes de réponses aux questions hurlées par un adolescent en quête d’identité. Comment Dallas peut-il espérer trouver sa destination, lorsqu’il ignore d’où il vient ?
Patrimoine génétique arraché à un paternel inconscient de son existence. Voit-il le monde de la même façon, ce géniteur ? Privé de nuances et de couleurs que le gamin ne peut qu’imaginer, piégé dans la grisaille de ce rouge qu’il ne peut distinguer. Ironique, quand on y pense, d’être incapable de différencier (à la couleur) l’huile moteur et l’hémoglobine, et d’oser penser un jour reconnaître son propre sang. Ce n’est pas faute de le chercher, ce père, dans les regards de tous ceux qui sont en âge de l’être. De quémander leur fierté et leurs encouragements, de supplier pour leur considération, pour une tape dans le dos.
Dallas erre comme la moitié d’un homme - moitié de lui - et s’attend à ce que les autres l’acceptent tel qu’il est; incomplet. Ce n’est pas faute d’avoir essayé, dans son enfance, de combler le vide avec les pièces d’un autre puzzle. Il a tenté, pourtant, de se plier et de se contorsionner pour entrer dans le moule. Les bonnes notes, les récompenses sportives. La petite-amie de bonne famille, la politesse envers les professeurs. Des efforts ignorés, des réussites toujours insatisfaisantes, une figure paternelle impossible à contenter. Son père, lui, aurait été fier. Mensonge que le prospect se raconte depuis son débarquement dans le fin fond du Texas, depuis que le cuir couvre ses épaules. Un homme qui n’aurait pas la raideur d’Henri, qui n’aurait pas cette moue pincée à chaque fois qu’il pose les yeux sur lui. Pas cette même gueule que tire Tig dès que le prospect apparaît dans son champ de vision.
Henri ou Tig - du pareil au même. La flamme dans leurs prunelles brûle du même éclat, savant mélange de dépit et d’agacement. Ils le fixent comme ils le feraient avec un chiot errant - pas par volonté de lui tendre la main, de le guider, mais par exaspération de le voir une énième fois chier sur leurs plates-bandes. « Et ? » Une syllabe unique, une question qui hurle déjà un refus. Le nœud dans sa gorge se double, se triple, et grossit à en empêcher l’oxygène de passer. « Mieux placé pour quoi ? Te refiler une médaille ou te préparer une fête surprise ? » Oui. Putain, oui. Juste une tape dans le dos, juste l’ombre d’un sourire. Behrendt se contenterait d’un hochement de tête, pourvu que Welch cesse de faire l’autruche face à ses efforts. « Je pensais que… » Lui-même se sait pathétique, la voix à peine plus haute qu’un murmure. La trachée écrasée par une anxiété qui ne lui ressemble pas, à cet animal sociable. Ce Golden Boy à la gueule d’ange, de ces sourires qui finissent dans les premières pages de l’album du lycée, créature bruyante et sûre d’elle qui s’efface dès que vient l’heure de demander à être inclus. « Qu’est-ce que tu veux exactement, Dallas ? Sois plus clair. » Est-ce si dur que ça, de le considérer comme un membre de la famille ? Ses parents n’ont jamais pu, eux.
« T’es pas en âge de boire ça, je te signale. » Sa boisson est subtilisée, ne laisse derrière elle qu’une couche de condensation sur ses paumes vides. Sérieusement ? « Tu ne… » Le gamin se musèle de son propre chef, les lèvres pincées dans une moue acide. La suite de sa phrase est ravalée, avec les dernières miettes de sa fierté, et la pilule a du mal à passer. Ses molaires se referment brutalement sur le coin de sa langue, concentrent la douleur sur un point précis quand ses iris furètent à droite, puis à gauche, pour s’assurer que l’humiliation ne s’échappe pas de leur tête-à-tête. La mine basse, ses narines frémissent d’une colère sourde, d’une frustration propre aux jeunes âmes incapables de réguler leurs émotions. Il macère, Dallas, dans cette bouillie de jamais assez bien et d’éternels reproches. Pourquoi ne voient-ils jamais le verre à moitié plein ? Ces hommes que Behrendt élève aux rangs de héros, avec la même ferveur que les minots idolâtrent les personnages de bandes dessinées. Aucun super pouvoir, ici - autre que la faculté à super-casser les couilles - aucune cape non plus. Juste le cuir usé par les années et les fils abîmés autour du rang du sergent d’armes et la veste du gosse fait figure de déguisement, un enfant de plus se prenant pour Superman. « C’est qu’une bière. » Grognement du fond de la gorge, à peine plus haut qu’un soupir. Son menton balance, balaie le reste de ce sursaut de fierté. Ce n’est qu’une bière. « J’suis pas venu pour te casser les co… » Il doit peut-être surveiller son langage, aussi ? La fin de sa tirade s’éteint et il presse sa langue à l’intérieur de sa joue, à défaut de la tourner sept fois au fond de sa bouche. « Pour gâcher ta soirée. » Les paumes levées, signe de reddition, il esquisse même un demi-pas en arrière. « J’sais que j’ai pas eu l’occasion de faire mes preuves, sur les choses qui comptent. » En dehors du récurage de chiottes, du nettoyage de gerbe, et du rangement de la réserve. « Mais j’pense que j’suis prêt. » tente-t-il, l’espoir sur le bout des lèvres, et le tracé d’un sourire sur le coin de la gueule. « J’sais que m’sieur Rei… » Reprise à la volée. « Qu’Austin a pas eu l’occasion de voir c’que j’vaux. Et Kale s’est barré… » Est-ce qu’il voit, maintenant, où le prospect veut en venir ? « Mais même si tu m’aimes pas… » Doux euphémisme, ignoré d’un haussement d’épaules. Le sergent d’armes n’est pas le centre du monde - bien qu’il s’en rapproche dans les grands yeux qui l’implorent. « Tu sais que j’vous décevrais pas. » Inspiration profonde par le nez, mieux vaut que ça sorte d’un coup. « J’veux en être. Pour de vrai. Pas à moitié. » Pitié, qu’on ne le laisse pas être seulement à moitié.
Clyde Saracen, Jean Lowe, Tig Welch, Livia Pereira, Bliss Llewelyn et Jared Cassidy aiment ce message
Lun 16 Sep 2024 - 10:59
Tig Welch
p e a c eo fm i n d
le clair
Age : Le regard terni par quarante-six années de vie, il accuse l’usure du temps et des cycles répétitifs, les mains aussi râpées que les mots qu’il utilise avec parcimonie.
Adresse : Nid construit à Midtown.
Labeur : La direction toute trouvée, les Bloody Eagles lui ont tout apporté au moment où il en a eu la nécessité, une famille, un sens, une mission et il s’acquitte de ses devoirs sans rechigner. Devenu depuis sergent d’armes.
Coeur : Il s’est convaincu du bienfondé de sa solitude.
Berceau : Clifton, le point de départ et la ligne d’arrivée d’une course qu’il ne pense pas remporter.
« If your world falls apart, I'd start a riot. If night falls in your heart, I'd light the fire. In the dark, when you sound the alarm. We'll find each other's arms. »
« It's funny 'cause if we just sat and talked. You'd see that it's just hard for me to be vulnerable 'cause I blocked it off, I got trust issues growing up. »
« And we will step outside checking that the coast is clear on both sides. 'Cause we don't wanna be seen. This is suicide. But you can't see the ropes. »
« When everyone you thought you knew deserts your fight, I'll go with you. You're facing down a dark hall. I'll grab my light and go with you. »
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Les yeux ne dévient à aucun moment, restent braqués sur ce visage que le temps n’a pas encore buriné. Trop jeune pour que les angles soient correctement définis, il fait état d'une spontanéité propre à l'innocence pas encore tout à fait ébranlée. Pourtant, il gâche toutes les opportunités associées en revendiquant aussi ardemment une place qui ne lui convient pas. Tig refuse de croire qu’à dix-neuf ans, c’est tout ce que la vie a à lui apporter (un constat qu’il a établi mille fois pour Clyde aussi). On ne lui a pas montré toutes les possibilités, pas offert les alternatives. On ne l’a pas aidé à trier les données avant de se prononcer. Ses convictions reposent, sans doute, sur des croyances erronées. N’importe qui, en perdant son chemin, se raccroche à la première lueur capable de déchirer l’obscurité. Ce n’est pas pour ça que le premier signe de vie signifie la proximité d’un abri ou même d’un ami. Si personne ne lui apprend à décrypter les signaux, comment peut-on espérer qu’il ne fonce pas droit sur le danger ? Tig se sait mal placé pour endosser ce rôle (surtout quand il n’a pas été choisi ou désigné) mais ça n’enlève rien à sa volonté. L’exécution de cette résolution en reste maladroite, l’approche demeure rude. La gravité de la situation exige une rigueur âpre selon lui. « Oui, effectivement, ce n’est qu’une bière. Tu t’en remettras. » Au lieu de passer l’éponge sur les souillures, il les gratte jusqu’à érafler la peau, jusqu’à générer des lésions permettant à la crasse de s'y faufiler et de tout infecter. Il répète stupidement un comportement incohérent et inefficace. Pour autant, il croit que le résultat pourrait être différent cette fois-ci car la retenue et le sang-froid de Dallas laissent supposer que la raison l’emporte sur le reste des émotions. La contrariété se devine, s’exprime subtilement dans le langage non-verbal opposé. Mais il ne franchit aucune limite, s’impose même un respect que Tig ne réclame pas (pas à cette extension-là du moins). Autant de compétences que Dallas ne met pas à disposition de la bonne entreprise. Ses mots se modulent selon un désir vicié, partent en quête d’une validation néfaste. Pourquoi ne voit-il pas qu’il n’a rien à prouver ? Surtout pas à ce groupe d’hommes désabusés qu’il semble ériger en modèles. Aucun d’eux n’a la stature pour se positionner comme tel. Ils n’ont absolument rien d’exemplaire, rien de stable. Rien d’enviable non plus. Les traits crispés, l’ancien soldat encaisse les commentaires erronés de son vis-à-vis. Le gamin ne réalise pas que sa valeur existe largement en dehors du club, il ne se demande pas plus en quoi cette affiliation lui serait utile à lui. Le raisonnement est pris à l’envers et témoigne de tout un tas de problématiques qui dérangent profondément le prétendu insensible.
Tig allonge son mutisme quelques secondes de trop, le fixe continuellement en attendant de trouver une réplique adaptée. Après une éternité à le jauger, sa voix laconique renvoie l’affirmation dans sa direction, y insuffle un doute volontairement. « Alors comme ça tu penses que tu es prêt ? » Personne ne l’est réellement. De ça, il est convaincu. « Tes capacités d’analyse et de déduction ne sont pas au point en tout cas. » Comme si tout ne pouvait se résumer qu’à une question d’antipathie (inexistante de surcroit dans ce cas). Il ne se donnerait pas autant d’efforts pour le préserver si sa tête ne lui revenait pas mais il se garde bien de le lui signifier. Il déteste devoir se justifier (à peu près autant que ce type de raccourcis l'insupporte). Ainsi, à la place, il dépose la bière réquisitionnée sur le comptoir et reprend de nouvelles enjambées en direction de la sortie. « Suis-moi. » Il accumule quelques pas supplémentaires une fois le seuil franchi, distance les odeurs d’alcool et le brouhaha ambiant pour se réfugier dans la quiétude à l’extérieur. Le cadre se prête mieux au sérieux de la discussion, permet aussi un certain recul concret sur cet endroit auquel le gosse veut tout à prix appartenir. Avec lenteur, le sergent d’armes extirpe un paquet de clopes de son blouson, n’en propose pas au gamin pour maintenir une certaine cohérence (autant l’éloigner de toute forme d’addiction) et la grille avant de se remettre à parler. « Explique-moi, c’est quoi au juste les choses qui comptent selon toi ? » Il doute que la réponse lui plaise mais elle aura le mérite de fournir les pistes nécessaires pour l’acculer dans cette vérité qu’il ne s’essaie pas à deviner. Peu doué dans l’art de persuader (un talent qu’Austin maitrise en revanche mais qu’il n’utilise que rarement à bon escient), il ne sait même pas à quoi il s’attend de cette démarche. Le prochain désastre parait déjà se profiler. Peu importe, il refuse de ne pas essayer. Il refuse d’appartenir à cette catégorie fermant les yeux sur ceux qui n’ont pas eu la chance d’être protégés, les laissant sciemment être dévorés par le monstre au bout du seul chemin éclairé.
Les iris se perdent sur le paysage, ne discernent plus vraiment les contours des bâtiments aux environs tandis qu’il tente (bien vainement) de cerner les motivations opposées afin d’en prendre le contrepied. « Tu te vois où dans dix ans, Dallas ? Tu voudrais qu’elle ressemble à quoi ta vie d’ici là ? » Encore une fois, il craint d’obtenir cette réponse-là. Si on la lui avait posée à son âge, sans doute qu’il n’aurait pas réussi à répondre lui-même. Piégé à Clifton depuis la naissance, inenvisageable de la quitter autrement que par le biais de l’armée, il a toujours su qu’il était condamné à vivre là et n'a jamais cru, au fond, pouvoir faire quelque chose de vraiment important. Au fond du crâne, la conscience chuchote une toute autre réalité. Non, ça n’a pas toujours été le cas. Cette pensée douloureuse creuse une ride supplémentaire autour des yeux, sourcils plissés sur cette émotion compliquée à avaler. Il prétend qu’elle n’existe pas, reprend une bouffée de nicotine en reportant son regard sur le môme à ses côtés. L’existence et la trajectoire de ce gamin ne devraient pas le préoccuper à un niveau aussi personnel. Pourtant, c’est bien le cas. Et que Dallas veuille l'entendre ou pas, il ne compte pas reculer.
Clyde Saracen, Jean Lowe, Livia Pereira, Dallas Behrendt et Jared Cassidy aiment ce message
Mer 23 Oct 2024 - 17:03
Dallas Behrendt
G O L D E NBOY
le clair
Surnom : Dallas dans la bouche de tout le monde, puisqu'il est facile de massacrer son nom de famille. Certains s'amusent à tenter de le héler par d'autres villes texanes, pour la vanne.
Age : Le gamin se pense déjà homme, se rase excessivement dans l'espoir de fournir une barbe parsemée. Dix-neuf ans, le lycée à peine derrière lui et l'interdiction de se payer une bière - mais pas un flingue. God bless America, I guess ? - 19.05.2005
Adresse : Squatteur depuis que la tempête a tout emporté à Trailer Park. Il migre de canapé en canapé dans l'attente d'un appartement dans ses moyens. En manque de courage, puisqu'il lui suffirait de décrocher son portable et de demander de l'aide. Mais ça inquiéterait sa mère.
Labeur : Larbin, homme à tout faire, plongeur, passeur de serpillère et champion du ramassage de vomissures en tout genre au Bloody Counter. Le prospect attend impatiemment les écussons qui viendront habiller son cuir, pour l'heure toujours vierge.
Coeur : Les jeux de l'amour ne l'intéressent pas. Les filles l'accompagnent parfois pour quelques nuits, le temps d'une poignée de sourires, sans jamais s'attarder. Célibataire et il les respecte trop, ces femmes, pour les laisser gâcher leur temps en sa compagnie.
Berceau : Les périphériques constamment pleins et les gratte-ciels occultants de la capitale de l'Etat. L'air irrespirable et pollué d'Austin, Texas ne vaudra jamais les étendues désertiques et le ciel bleu de Clifton.
'Cause everyone's growing and everyone's healthy
I'm terrified that I might never have met me
Préférences rp : ✺ Troisième personne
✺ De 500 à 3000 mots, laissons-nous porter.
✺ Dialogueen français ou en anglais, venez comme vous êtes.
l'obscur
tw. mentions d'alcool et d'activités illégales.
Your boldness stands alone among the wreck - atmosphere -
Tu as les yeux de ton père avouait parfois sa mère, à la fine frontière entre le compliment et le reproche. Mais jamais son paternel ne l’aurait détourné, ce regard. Jamais il ne l’aurait baissé pour fixer le bout de ses chaussures, comme un gamin pris en faute. Jamais il n’aurait manqué de lever fièrement le menton, jamais il n’aurait refusé de poignarder l’adversaire d’une œillade assassine. Peut-être Dallas ne lui ressemble-t-il pas autant qu’il voudrait le croire, à ce géniteur étranger, puisqu’il se passionne pour une tâche d’alcool sur le sol, près d’une de ses pompes, plutôt que d’affronter Tig. « Tu t’en remettras. » annonce ce dernier, balayant de quelques syllabes toutes les conséquences de ses rejets en cascade. Le détachement dont l’aîné fait preuve est plus humiliant que les heures cumulées à récurer les chiottes du Bloody Counter, plus douloureux que les abandons successifs dont Behrendt a été victime. Welch érige, comme un beau-père avant lui, une muraille entre sa famille et l’intrus. Une palissade de verre, au travers de laquelle Dallas a tout le loisir d’admirer une équipe qu’il ne rejoindra jamais. Tu t’en remettras. Et le petit n’est pas sûr de savoir combien de non il pourra encore encaisser, avant de baisser les bras. Avant de commencer à les croire, ces voix qui susurrent qu’il n’est bon à rien, bon pour personne. Pas même pour son propre sang. Pas même pour ce club. Pas même pour lui-même.
« Alors comme ça tu penses que tu es prêt ? » Les yeux océans montent sur la trogne du sergent d’armes et, après une seconde, il se met à hocher vigoureusement la tête. « Oui. Oui, j’suis sûr que… » Une tirade coupée, avortée dans l'œuf par les mots tranchants de son vis-à-vis. « Tes capacités d’analyse et de déduction ne sont pas au point en tout cas. » Le coup est bas, l’attaque est vile, mais le tout a le don de réduire le gamin au mutisme le plus total. Tous les viseurs braqués dans sa direction, il a tout de la biche traquée qui, épuisée, n’attend que le coup de grâce pour toucher au repos. Une estocade que Tig tarde toujours à donner, chasseur cruel qui aime voir sa proie agoniser et se débattre. Il ne le virera jamais, pense le jeune Behrendt, il le poussera au départ. Puis il se gargarisera auprès de qui veut bien l’entendre qu’il avait eu raison de clamer que Dallas n’avait pas l’étoffe d’un Bloody, qu’il n’avait pas les couilles pour se battre pour obtenir ce qu’il veut.
Peut-être a-t-il raison, puisque le gamin préfère se mordre la langue plutôt que de nier, de se révolter, d’exiger son respect. Une technique de clébard que de se coucher devant le chef de la meute et si Tig n’est pas aux manettes, il n’est pas loin du cockpit. Le regard impuissant de Behrendt fouille et cherche, fouine sur les carcasses du bar à la recherche de la stature familière du tenancier. Pas de Jared à l’horizon et Dallas devra survivre aux prochaines minutes sans compter sur une aide providentielle. « Suis-moi. » Le fidèle chiot pose à nouveau les pattes sur terre et emboîte le pas, la tête baissée et la queue entre les jambes.
L’air n’est pas plus frais à l’extérieur, mais le vacarme se tait lorsque la porte se referme derrière eux. L’étrange silence ajoute à la solennité de l’instant, transforme ce tête-à-tête en un drôle de conciliabule - encore faudrait-il y ajouter une complicité entre les deux parties. Les deux hommes campent (l’un plus droit et impressionnant que l’autre) sur leurs positions, et le plus jeune dévore sa langue pour ne pas être le premier à l’ouvrir.
La flamme du briquet crépite et, dans un réflexe, Dallas se déplace pour éviter la brise et les fumées nocives qui pourraient lui parvenir. Vieille habitude de ses espoirs sportifs, préservation de ses poumons - lui qui n’avale jamais réellement les quelques inspirations qu’il vole parfois sur les cigarettes proposées, honteux de ne pas se détruire la santé. « Explique-moi, c’est quoi au juste les choses qui comptent selon toi ? » Vaste interrogation, à laquelle le naturel répond le premier. « C’est quoi cette question à la con ? » Un souffle s’échappe de son nez, une tentative d’alléger l’atmosphère étouffante - mais Tig n’est pas de ceux sur qui cela fonctionne, aussi Dallas s’empresse-t-il de recouvrer son sérieux. « Euh… ça dépend. En général ? » Ou faut-il qu’il édulcore pour coller au mieux à ce que le sergent d’armes veut entendre ? « La famille. » Sa mère, même s’il ne l’appelle plus. Le club, même s’il n’en fait pas partie. « La loyauté. » Envers ses engagements, envers ses promesses, même envers les connards sans coeur comme Welch. « L’honnêteté. C’est quand même vachement important, ça. » Hypocrite quand on sait qu’il raconte de jolis mensonges à quiconque tenterait de l’approcher - Livia en tête - pour ne pas les confronter à la médiocrité de ce qu’il est. Sa main frotte sa nuque moite, de chaleur et d’angoisse.
« Tu te vois où dans dix ans, Dallas ? Tu voudrais qu’elle ressemble à quoi ta vie d’ici là ? » L’interrogation le prend par surprise et sa langue s’assèche. Tu veux faire quoi, quand tu seras grand ? Les exposés enfantins, les collages en bâtonnets de glace, les dessins hésitants de fusée ou de treillis. Astronaute, militaire, super-héros, joueur de NFL. Le calque parfait d’un modèle existant, copie conforme, plagiat d’hommes qu’il admire. Buzz Aldrin, George Patton, Clark Kent, Travis Kelce. Les molaires écrasent l’intérieur de ses joues, qu’il finit par gonfler. Un haussement d’épaules et un soupir désintéressé ne seront pas une réponse, cette fois, aussi enfonce-t-il ses mains dans les poches de sa veste. Il planque ses phalanges blanchies par la force dans ses jointures, l’envie de planter ses ongles rongés dans ses paumes pour que la douleur le réveille. Il faut répondre, maintenant.
Dix ans, ce n’est pas énorme. Il n’aura pas la trentaine, aura à peine une barbe correcte et se sera débarrasser des rondeurs enfantines de ses pommettes. Dix ans, c’est gigantesque. A la décennie dernière, il s’amusait à effrayer Lucy en faisant bouger ses incisives de lait et pensait que la pire des trahisons était le mensonge du Père Noël. Le gamin bascule, se balance de ses talons à la pointe de ses pieds, avec l’amer impression de présenter son projet devant une salle pleine de Tig prêt à éviscérer le moindre de ses rêves. « Je ne sais même pas où je serai l’année prochaine. » avoue-t-il, un poids sur la trachée. Et peut-être que ses mots sont empreints d’une fine couche de reproches, peut-être qu’il accuse d’une oeillade son interlocuteur. Puisque sa place est inconfortable, les deux pieds sur une trappe prête à s’ouvrir au moindre caprice du sergent d’armes. « Mais ce n’était pas la question. » Les doigts enfoncés dans les paumes, il redresse les épaules et prend une inspiration.
« Je sais pas vraiment, Tig. J’ai pas réfléchi aussi loin, et… Parce que j’ai envie d’être comme toi, parfois. » Constamment. Au point d’essayer d’adopter sa démarche, de s’entraîner à lancer des regards glacés dans le miroir, de copier ses grimaces. « Et j’espère être comme M’sieur Reid. » La confiance en soi, le menton haut, l’aura qui envahit la pièce. Austin ne s’excuse pas d’exister. Austin ne demande pas la permission de respirer. Et bêtement, il espère avoir les méninges assez vives pour s’élever au rang de Cassidy, ne pas décevoir le seul type qui le regarde comme son égal. « Et quand j’vous écoute, quand Jared m’raconte des trucs… » Ses dents attaquent sa langue, dévorent les mots qui veulent filer et les écrasent, les écrabouillent, pour n’en rendre qu’une version édulcorée, facile à avaler, facile à recracher. Pour mieux planquer sous le tapis et garder pour lui les folles accointances (qu’il s’imagine sûrement) partagées avec Cassidy. Ca aussi, Tig le lui volera, puisqu’il ira inévitablement expliquer à Jared que leur prospect est un raté et qu’il ne mérite pas son respect - ou pire, son amitié. « Ou j’aurais appris à réparer des bécanes pour bosser au garage. Je sais pas vraiment, j’ai envie de faire plein de trucs, d’essayer, et… » Ambitions au ras du sol, rêves sans ailes, espoirs qui n’ont jamais eu l’occasion de s’élever. « Et j’veux être encore là, dans dix ans. Avec vous. Et qu’on puisse boire une bière ensemble, quand ça te conviendra. » Le gosse tente une ébauche de sourire, une brève esquisse maladroite et mal à l’aise. Un rictus qui s’évanouie presque aussi vite qu’il est arrivé, de peur que Tig ne confonde les espoirs du jeune prospect avec une prise à la légère. Puisqu’il la reconnaît, cette façon de le regarder. Comme Henry le regardait. Comme sa mère le regardait. Comme tout le monde le regarde. Un mélange de pitié et d’agacement, une pupille qui hurle pourquoi tu n’es pas mieux que ça ? Ce même voile qu’il croise dans la glace tous les matins, qu’il ne connaît que trop bien.